Alors que la guerre en Ukraine fait rage et que le conflit s’enlise dans une intensité jusqu'alors reléguée aux livres d’histoire, contraint par le calendrier officiel, Emmanuel Macron annonçait cette semaine sa candidature. Mettant fin à un long faux suspense, il a d’emblée monopolisé l’attention de la campagne.

Emmanuel Macron enfin officiellement candidat

Voilà qui est fait. Les équipes de la République en Marche vont enfin pouvoir faire campagne sur un nom, et non plus sur le seul slogan de la campagne Avec Vous.

Alors que le Conseil Constitutionnel avait demandé aux candidats ayant reçu leurs 500 parrainages de faire savoir leurs intentions électorales avant ce vendredi 18h, le Président de la République a officialisé sa candidature au renouvellement de son mandat.

Cela faisait des semaines, voire des mois que l’équipe de campagne du Président de la République réfléchissait à une date. Des semaines à attendre que vienne le moment parfait. Mais la recrudescence des cas de covid, puis ces derniers jours la guerre en Ukraine ont chamboulé toutes ces perspectives. Acculé par un agenda diplomatique et international peu propice à la fanfare, Emmanuel Macron a donc choisi d’adresser une Lettre aux français dans laquelle il exprime son intention d’être à nouveau candidat à l’élection présidentielle. Le Président voulait une annonce disruptive mais élégante. C’est râpé. Du moins pour la disruption. Une lettre, en soit rien d’original. Mais le moment que nous vivons a dispensé le Président de la République de toute critique. Mieux vaut se concentrer sur le fond, la crise ne laisse pas de temps pour s’éterniser sur la forme.

Dans cette lettre, Emmanuel Macron évoque les erreurs commises aux débuts de son mandat, mais aussi sa capacité à apprendre et sa volonté, toujours intacte, de vouloir réformer le pays, tout en disant avoir appris de lui, et voir les choses sous un autre angle désormais. Dans les dernières lignes, Emmanuel Macron précise cependant :

Bien sûr, je ne pourrai pas mener campagne comme je l’aurais souhaité en raison du contexte. Mais avec clarté et engagement j’expliquerai notre projet, notre volonté de continuer à faire avancer notre pays avec chacun d’entre vous.

Faire campagne. Voilà une tâche bien compliquée pour Emmanuel Macron. Le Président de la République avait tout fait pour retarder son entrée dans le débat, mais voilà que désormais, l’Ukraine l’empêche de descendre trop longtemps dans l’arène. D’abord perçue comme un vrai handicap, cette situation devrait finalement lui profiter. Empêché de faire campagne sur le terrain, c’est comme si le conflit allait finalement mettre en lumière l’activisme du Président et ainsi jouer en faveur de la campagne du candidat. Au final, il semble que les français aient comme dispensé le Président de la République de se jeter dans les débats stériles auxquels se vouent ses concurrents, au motif que ce dernier a décidément plus important à gérer.

Pour autant, l’équipe de campagne cherche à montrer une nouvelle figure de la personnalité d’Emmanuel Macron : celle d’un Président de la République à nouveau candidat. Pour ce faire, la chaine Youtube diffusera chaque semaine une mini-série documentaire, intitulée Le candidat, tournée façon coulisses, comme une sorte de brève conversation avec le Président de la République sur sa campagne. Un format intéressant, entièrement produit en interne et diffusé en exclusivité sur les réseaux sociaux. Mais puisque les images de campagne sont rare du côté de l'équipe Macron, se format est inévitablement repris par les chaines de télévision. Malin de la part de son équipe, qui maitrise entièrement ce qu'elle montre et prévient ainsi de toute mise en difficulté.

Cette crise, comme les précédentes traversées par Emmanuel Macron semble une nouvelle fois s’avérer être une opportunité de révéler ses capacités. Depuis le début de l’invasion Russe sur le territoire Ukrainien, les intentions de vote en faveur du Président de la République explosent. Ce weekend, IPSOS sortait un sondage créditant le Président sortant de 30.5% d'intentions de vote au 1er tour. Le plus haut score annoncé jusqu’à présent. Le rolling de l’IFOP de ce samedi restait plus mesuré mais donnait tout de même Emmanuel Macron en tête et en forte progression, avec 29% d’intentions de vote au 1er tour.

Ces scores sont probablement surestimés. L’effet d’annonce booste les chiffres en faveur du Président de la République et la pression autour de la crise ukrainienne reste importante, jouant en sa faveur. L’effet d’annonce estompé, et la crise ukrainienne passée de nouveauté devraient avoir pour conséquence une légère baisse de ces chiffres. Mais une chose est sûre : la dynamique est bien là, et le candidat progresse en effet dans les sondages.

Cette progression est d’autant plus crédible qu’elle s’accompagne de nombreux ralliements. Cette semaine, nombreux ont été les élus et personnalités politiques à annoncer soutenir le Président de la République, renforçant un peu plus l’idée d’une Union Sacrée autour de sa candidature. Parmi les grandes figures qui supportent désormais le Président de la République : Martine VASSAL, Présidente de la Métropole Aix-Marseille et influente dans les réseaux LR du Sud, François REBSAMEN, le maire PS de Dijon, dont le soutien se faisait attendre. D’autres anciennes figures politiques comme Jean-Pierre CHEVENEMENT, Jean-Pierre RAFFARIN ou encore Manuel VALLS ont tous confirmé leur soutien à la candidature du Président sortant.

A droite, la crédibilité des candidats en voie de disparition

Valérie Pécresse semble décidément mal engagée. La candidate des Républicains continue sa descente aux enfers après plusieurs semaines catastrophiques depuis son meeting francilien. Première bourde : la mise en scène ridicule d’un Conseil de défense sur la situation en Ukraine. Pour essayer d’illustrer une stature internationale, Valérie Pécresse se met en scène autour d’une table, avec plusieurs anciens ténors de la droite. Salle de réunion ridicule, nape froissée, mise en scène grossière, bref l’opération com est ratée. Pire, les récentes déclarations de la candidate sonnent faux. Lorsque Valérie Pécresse déclare, en sortant du Salon de l’Agriculture, aller “s’occuper de l’Ukraine”, non seulement elle est ridicule mais elle fait défaut au sérieux avec lequel doit être traitée cette guerre.

La candidate fait toujours face à d’importants problèmes dans ses discours. Sa diction est mauvaise, et en devient une nouvelle fois fortement problématique.

Alors avec de tels évènements dans sa campagne, pas de secret, les intentions de vote en faveur de Valérie Pécresse sont en chute libre. Alors que la candidate fut créditée à presque 20% d’intentions de vote après le Congrès des Républicains, elle se rapproche davantage des 10%. Le dernier rolling de ce weekend la donnait à 14%. La candidate traversera la semaine prochaine une nouvelle période difficile. Nicolas Sarkozy, toujours très influent à droite, refuse de lui apporter un soutien officiel. L’ex a même appelé à soutenir unanimement les efforts diplomatiques d’Emmanuel Macron. Certains journalistes faisaient état de discussions ce weekend, qui conduiraient peut être l’ancien Président de la République à apporter son soutien à Emmanuel Macron dans la semaine. Pour Valérie Pécresse, ce coup serait fatal.

Marine Le Pen enchaine les faux pas de son côté. Pas de danse d’abord. En visite au Salon de l’Agriculture, la candidate s’est lancée tenter par une danse sur les stands Outre-Mer du Salon. Problème, au moment où les regards sont tournés vers les bombardements en Ukraine, danser la salsa apparait quelque peu décalé. Le Salon de l’Agriculture est une fête, mais faire la fête dans ce contexte passe mal lorsque l’on envisage de devenir Président de la République.

Enfin, puisque visiblement l’équipe de campagne de Marine Le Pen n’est pas à une bourde près, toujours sur le même stand Outre-Mer du SIA, Marine Le Pen tweete, qu’elle, élue, créera un Ministère dédié aux Outre-Mer. Pas de chance pour la candidate, celui-ci existe depuis 1946.

La campagne d’Eric Zemmour patine. Affaibli par ses déclarations passées sur Vladimir Poutine et son régime, le polémiste se trouve en difficulté dans les sondages. Crédité de 12% ce weekend, il tombe bien bas. Il faut dire que depuis l’invasion russe de l’Ukraine, le candidat a dû mal à justifier ses propos. De plus, les positions de son équipe sur le sujet manquent de clarté. Le polémiste a même annulé en dernière minute sa venue dans la matinale de France Info cette semaine, indiquant vouloir prendre du temps pour réfléchir sur sa campagne. Cette annulation de dernière minute, lui a valu le propos très intéressant de Marc Fauvelle, le co-présentateur de l’émission.

Alors pour remonter dans les sondages, le polémiste compte sur ce weekend. Ce dimanche, il devait tenir un meeting à Toulon au cours duquel Marion Maréchal Le Pen devrait officiellement lui apporter son soutien. Son arrivée au sein de Reconquête! devrait donner un nouveau souffle à sa campagne, et ralentir celle de Marine Le Pen.

La gauche implose

La gauche, on le sait, a dû mal à se faire entendre dans cette élection. Seuls les clashs et les polémiques semblent faire parler d’elle.

Cette semaine a mis fin à l’éphémère candidature de Christiane Taubira. Mystérieusement initiée en décembre dernier, elle avait remporté le vote de la Primaire Populaire fin janvier. Aujourd’hui, n’ayant pas reçu les 500 parrainages nécessaires à la validation de toute candidature devant le Conseil Constitutionnel, elle a été obligée se retirer de la course. La candidate a dénoncé un système injuste l’empêchant d’être candidate.

A la suite de sa déclaration, la Primaire Populaire, plateforme politique de gauche qui avait légitimé la candidature de Christiane Taubira par le vote de ses militants, a annoncé dans la foulée soutenir Jean-Luc Mélenchon. Le choix de cette instance est plus que surprenant. En effet, l’Insoumis était arrivé en 3e position du vote des militants, derrière Yannick Jadot. Les convictions personnelles des fondateurs cette plateforme semblent avoir pris le dessus sur celles des 400 000 inscrits.

Du côté de la campagne de Yannick Jadot, les équipes ont mis fin cette semaine à un long supplice. Celui de compter parmi les membres de la campagne son ex-rivale Sandrine Rousseau. Accusée de perturber sans arrêt la campagne du candidat EELV par des polémiques inutiles, elle a été mise à la porte par le directeur de campagne de Yannick Jadot. Une décision qui va sûrement causer quelques ennuis au candidat.

La semaine prochaine, Emmanuel Macron effectuera ses premiers déplacements en tant que candidat et devrait tenir un premier meeting le weekend prochain. L’occasion pour le Président-candidat de voir comment imprime sa campagne sur le terrain.